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Zoë Buckman : Artiste féministe engagée

Gants de boxe et utérus

Longtemps boxe et femme n’avaient rien à faire dans la même phrase.
La boxe était un sport masculin est résolument sexiste. N’ayons pas peur des mots.
Seules les femmes autorisées à pénétrer sur le ring étaient les « Ring Girls ».
Vous savez, celles en short trop courts juchées sur des talons trop hauts? Celles qui avaient pour fonction principale d’annoncer les nouveaux rounds en brandissant des pancartes au dessus de leurs têtes ?


Depuis quelques années les dirigeants ont fini par leur accorder davantage de crédit.
Et depuis l’artiste Zoë Buckman on peu à présent pousser le paroxysme en juxtaposant les mots gants de boxe et utérus.

Mais qui es-tu Zoë ?

Qui est cette artiste incroyable qui a réussi à faire le grand écart entre la boxe et la féminisme ?
Zoë Buckman, artiste britannique contemporaine encore méconnue des français vient d’une longue lignée d’artistes écrivains et acteurs.
Artiste plasticienne multidisciplinaire, elle évolue dans la photographie, la broderie et la sculpture.

Let Her Rave

Après plusieurs projets et installations, 2016 est l’année où Zoë présente « Let her Rave ».
Tout part d’un poème de Kneats et d’un vers qu’elle ne s’explique pas. Bien que grande admiratrice du poète, elle condamne sa prose sexiste et condescendante à l’égard des femmes.

Or if thy mistress some rich anger shows/ Imprison her soft hand, and let her rave/ And feed deep, deep upon her peerless eyes.

Ode on Melancholy, John Kneats


Ainsi, elle mettra en lumière la place des femmes dans la société.
En opposant des matériaux qui normalement ne devraient rien à faire ensemble elle illustre les agressions complexes auxquelles les femmes sont confrontées chaque jour. Ou comment il est dur pour elles d’exister et d’être reconnues.
Elle même boxeuse, le choix du gant n’est pas anodin. La violence des coups, mixée à des chutes de robes de mariées vintage évoquent le poids de l’institution du mariage et cette ambivalence entre la féminité et la férocité dont les femmes doivent faire preuve afin de s’en sortir.

« La forme et le symbolisme des gants de boxe, avec leurs qualités dures et douces, peuvent être explorés artistiquement et visuellement de tant de manières différentes (…), ils sont fabriqués avec le cuir le plus doux et le plus beau, mais ils sont utilisés pour faire beaucoup de mal, ainsi que pour la protection.»

Extrait d’Interview Artnet News traduit.

Sur les traces de Louise Bourgeois

Deux ans après, l’artiste dévoile son nouveau projet: « Heavy Rag ».
Ici encore elle utilise des grappes de gants de boxe qu’elle recouvre cette fois de torchons et de broderies.
Ce n’est pas s’en rappeler le travail de notre Louise Bourgeois nationale et son oeuvre « Poids ». Cette grande artiste féministe y mêlait au verre des matières textiles brodées. Ses sujets de prédilection tels la sexualité, la féminité ou encore la perte de sa mère y sont toujours abordés.
Elle brodera d’ailleurs sur un mouchoir; un message adressé à sa mère: « Ne m’abandonnez pas ».

Je me suis retrouvé à regarder les femmes sur les épaules de qui je me sens, comme un moyen de traiter une perte imminente. Louise Bourgeois et ses œuvres textiles ont été une énorme inspiration pour cette série.

Zoë Buckman

Zoë Buckman marche sur les traces de Louise Bourgeois quelque temps après avoir elle aussi connu une perte tragique.
Effectivement, après 9 ans de lutte acharnée, sa mère décède d’un cancer.
C’est alors que l’artiste se réfugie vers ce qui la rassure : sa maison, ses racines, la cuisine de sa mère aux vieux torchons qu’elle brode et qu’elle utilisera pour recouvrir les gants.

Une fois encore l’artiste juxtapose des matériaux que tout oppose afin d’exprimer son traumatisme et le plaisir de cette relation à présent perdue.

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